poesie
Pourtant Narcisse était solitaire
Pourtant Narcisse était solitaire,
Devant son miroir d'eau, il se plaisait.
Les autres, vide crochu, prédisaient
Le monde trop plein des cris délétères.
Tu es si beau, laid, idiot ou rusé,
La horde se gave, repue du parterre
De harpies croupies, accroupies, brisées,
Derrière leur vitre, ça déblatére.
Image où il pose son baiser.
Ils l'aimeront, statue d'un jour prisée,
Devenue simple caillou qu'ils jetèrent
Au loin. Narcisse était solitaire
Vivants après toi
C'est écrit dans les cieux, ont dit
Les étoiles. Lève les yeux, lis.
Je ne vois pas, ça m'eblouit,
Je ne peux pas, ça m'engourdit.
Je ne veux pas des paradis
Ou enfers fermés qui convient
Au festin sans faim, dur, rassi,
Suis tendre pierre impolie.
J'ai fui le destin d'or durci,
Libre, ivre de tout, j'ai choisi.
Vivants après toi, infinis,
Vois les astres qui t'ont choisi.
Ici, on se tait
Ici, on se tait, tout est calfeutré,
Venez avec vos erreurs de grand dadais,
Mais s'il vous plaît, ne venez pas fardés,
Laissez loups, chapeaux raides à l'entrée.
L'orgueil meurt, la mémoire débridée,
Elle va dans tous recoins, éventrée,
Explosant, peignant sur les murs d'un trait.
Ils courent vains, leur passé succédait.
C'est labyrinthe aux vielles idées,
Fantômes fissurés le teint fardé,
Humain, on ne resort que par l'entrée.
Prenez l'enfant, la canne peut céder.
La vie en mieux
Être naïve, souple hirondelle,
Aller vers d'autres cieux où l'herbe est bleue,
Où la nuit est jaune, chauffe en creux,
Sentir, fuir le danger d'un seul coup d'ailes.
Quand la nuit trompe le jour infidèle,
Tu interprètes, oublies qu'on est deux,
Tu n'es rien sans moi, dit le froid épris d'elle.
J'ai un poids. Je cherche la vie en mieux.
La dernière nuit
J'ai fait tout ça pour cesser de penser,
J'ai fait tout ça pour rester un gamin,
Je barbouille, grifouille insensé,
Retrouver le sens sera pour demain.
Mais il y a un sens à tout, pressé
De te trouver. L'ennui baise sa main,
L'enmene au lit pour l'oubli, enlassés,
Son gros sac délaissé sur le chemin.
Son lit haut dans l'arbre, la pluie rincait
Le creux fertile où tout s'est tassé.
La mort l'aime, tatoue rouge carmin,
L'oubli, dernière nuit sans lendemain.
Parler au grand poète
Petit aux petits mots n'était pas inspiré,
Comment dire la barbarie ? Vieux casse-tête.
Il monte ou descend parler au grand poète,
Le diable ricanne, dit c'est désespéré.
Ils sont trop bêtes, dansons avec les bêtes,
Ils sont trop chauds, la feuille brûlée, évaporée.
La mort gifle. Le sang gicle, rien ne l'arrête.
Le mot faible est vaincu. Il meurt raturé.
Suis dans mon trou peinard, dit le grand poète,
Mais leurs râles, sales bruits infiltrent ma tête,
Ils trouent mon crâne pourtant usé, effaré.
Là, ange, démon, font la paix, enamourés.
Méfie-toi, il sait tout ce vieux rapace
Tu as cru que ce grand bonhomme se fuyait,
Il suit, coince un matin dans l'impasse.
Pas comme toi, un mal bien habillé,
Bien réveillé, il lave et repasse.
C'est sûr, c'est le Réel sûr qui vient broyer
Ta magie éperdue puis perdue face
Au type maigre venant festoyer.
Méfie-toi , il sait tout ce vieux rapace.
En plein cagnard, place nue, dépouillée,
Et la tête fumeuse qui bouillait,
Empalée sur une perche de glace.
Le sourire morbide. La grimace.
Plagiat d'une rose
La folle se prenait pour une rose,
Perruque pourpre, mascara fringant
Qui pique; corbeau, bec dressé, narguant.
Pour l'honorer que volent toutes roses.
Beauté opale qu'on fouette de rose,
Toujours les mots se posent élégants,
Un chemin de grains noirs, bise éclose,
Fragile, on la sent même de gants.
Que se taisent tous ces mots arrogants,
Beau leurre de soirs maquillés, moroses.
Mettez-la dans un linceul, dans un gant,
Près des pétales, gardez ses joues roses.
Les enfants jouent, tout va bien
Bien, les enfants jouent, tout va bien,
Ils jouent de rien, j'y comprends rien,
L'idéal, jeu entre leurs mains,
La vie sera pure demain.
Au Sud, à quoi joue le gamin ?
Un ballon dégonflé, son bien,
Un fer rouillé dans l'eau, soutien,
Ça le tue, il rit le gamin.
Il vend nos détritus de chiens,
Sales, trop gras pour le chemin
De Terre pourrie pour demain.
Mais les enfants jouent, tout va bien.
Mourir dans la nostalgie parallèle
Les morts sans lasse, elle les ressent,
On les aimait, l'alcôve surréelle,
Goût d'un nid d'opium, molle hirondelle,
Ici on ne réfléchit pas, on sent.
L'intuition en haut, l'instinct épris d'elle,
Elle sait avant eux, sens clair, puissant.
Restons dans le velours noir caressant,
Mourir dans la nostalgie parallèle.