poesie
En pleine Méditerranée
Elle rôde en pleine Méditerranée,
Issue du désert et des neiges effrénées.
La froideur la sculpte diaphane de passion,
La chaleur la fait fondre vite en réaction.
"Viens, tu es nôtre", chante une voix déchaînée.
Le Nord vole son bras, le Sud sa jambe, scission
De l'âme de nulle part dénotant gênée.
Etrange, elle est démembrée sur l'embarcation.
J'ai cherché Dieu
J'ai cherché Dieu derrière une pierre
Dure sans bouger malgré mes prières.
J'ai cherché Dieu dans le creux d'une rose
Gorgée au matin, chair d'apothéose.
L'âme dépassant le maître des choses
A arraché la beauté, meurtrière,
Mené l'enfer banni à la lumière.
Le paradis rit de l'épine, ose.
La sirène en pierre
On dit que tu effaces, noies, même l'amer,
Chante la Patiente au Temps assujettie
A ceux aimés, morts, qui l'ont lentement bâtie.
Elle est sirène en pierre usée par la mer.
Tant de morts lui grignotent le bras bien petit,
Elle les tenait, folle, mais ils sont partis
Lui fissurant l'écaille, la jetant à terre.
Elle apprend à marcher, boiteuse, solitaire.
Fleur en tête
Ainsi tu es prisonnier d'autrui, il t'arrête,
Toi pauvre poète charmeur, le mal en tête.
Tu offres tellement d'indécents dégorgements
Pour un soupir esclave, un sourire aimant.
La vie serait cimes, abysses sublimant
Le noir au reflet doré, l'étrange épithète.
Pour un bravo, tu te perds, t'enroules, rimant
Sans fin. Ta fleur en tête, bossue, les inquiète.
Je serai cet enfant
Même dans les grottes sans vent battant
Le Temps s'engouffre partout, je l'attends.
Sur mes pleurs, son éclat a tressailli,
Il scintille sur mon chagrin pétri.
Il flambe vite, j'ai saisi l'instant.
Il dit : "J'obscurcis les peines vieillies,
J'oublie, délaisse les naïfs en vie".
Moi, je serai cet enfant hors du Temps.
Les porcs sont légion
Chaque famille abrite son porc,
Penaud du pire, l'oeil voit au travers
De la robe des jeunes fleurs en vert.
Il revient, sue, le vice par les pores.
Sa main à fauché d'un sale revers.
On tait l'ordure, c'est l'enclos des torts.
Une fleur nous dit, elle s'évapore :
"Ne m'enterrez pas prés du pervers".
Péché au cou
Pour ses ennuis élevés, imaginaires
Il était piteux, misérablement
Traîné devant le sot public dément,
Celui narquois de son éclat de nerf.
Honte à lui ou à ses congénères ?
Ils le mirent sur l'âne, le tournèrent
En ville, péché au cou, sec, le blâmant,
Face aux arrogants riant sûrement.
On ne dérange pas les morts
La tombe s'est fêlée par ses secrets,
Ce mort-là a tout avalé discret,
Prenant avec lui sa pudeur ravie,
Le mot gît perdu, au plus bas, dévie.
La nervure folle, en sang, se crée,
C'est la force tue qui pousse, survit.
Face à moi le silence dense, ancré,
J'appose, crie, ma névrose de vie.
Bosses de vie
Le chameau porte ses brûlants soucis,
Bosses de toutes ses vies entassées,
Cogné par la peine aride si
Trouble qu'il boit ses larmes, insensé.
Le ciel lorgne de suaves éclaircies
Sur le mal en braise, charge pressée
Sur son dos. Au soir, le puits l'a rincé,
Repu de clarté, la bosse amincie.
Le prisonnier sauvage
L'irrationnel assourdi désarmait,
D'un soldat, mugissait une armée,
D'un mauvais fragment, des peurs enchaînées,
Le prisonnier sauvage me traînait.
Prison en soi, la porte se fermait
Pour ceux repliés en rond, cognés
Par les ombres sans versant qui trépignaient.
L'issue tremblait à vif, se consumait.