Le Héros qui pleurait
C'est une immense armoire à miroirs,
Celle de la grand-mère qui engendra l'As.
On s'y voit, on la polit, on croit qu'on la casse,
Bâtir la grande histoire, remplir les tiroirs.
Les femmes s'admirent, se pâment, frustrées jacassent,
Et les hommes observent leur petite race,
S'essayant, gesticulant pour venir s'échoir,
Le Héros n'y voit qu'une ridicule foire.
Lui ne sentait que son propre mouroir de face,
Tout en ressortant de son armoire à glace.
Il pleurait sa jeune mort plein de désespoir.
Cachée, j'ai vu sa larme fêler cette armoire.
Au creux du jour
Ma Mie, fais attention au creux du jour,
A t'encombrer de ces fleurs de toujours,
Ce dôme intérieur fait seul écho
Au pharaon doré en son tombeau.
Elle est douce la pensée de velours,
Elle amortit les chocs sourds, les plus lourds,
Mais elle entend en bas le chant d'un beau,
Un présage la veut, vilain corbeau.
Princesse s'admirant dans son château,
Belle d'intérieur, pour elle seule ses atours,
Dormant pour presque toujours dans sa tour.
Sans se pencher. Elle tomberait de haut.
Cœur poussière
Il monte l'escalier, laborieux, fier.
N'observe pas l'arrière, tiens un pilier.
Vertige. Oublie les sombres pierres,
Tiens le lierre, le vivant est l'allié.
Les pierres disparues de ce collier,
Qu'on admire, qu'on tire par derrière,
Sont reflets où luisent les bras déliés,
Avenants des Chimères. Coeur poussière.
Qui de nous deux perdra l'âme ?
Ton sang me brûle, toi guerre vorace,
On dit que tu crames même les flammes,
Poète sans peur, ma torche est vivace
Quand j'écris : qui de nous deux perdra l'âme ?
Mon combat est en dedans, je me blâme
Quand tu aboies, la voix épaisse, basse,
Qui purulle de l'Autre qu'on fracasse.
Ma lettre meurt sur mon vélin. Noble l'âme.