La fille du brouillard
Où allais-je ? Le temps illuminé ballottait
Mon cœur hypnotisé par les éclairs précis.
La raison s'est jetée dans un puits obscurci,
Mais les rêves éternels regardaient, flottaient.
Près du puits, sous l'auvent de chagrin, une attristée
Cachait la joie florissant la fragilité.
L'âme lavée par les sensationnels soucis,
La fille du brouillard cultivait l'éclaircie.
Fleur de rien
Que j'admire ce papillon ! Il rit le nez
Chu sur la fleur revêche qui se pavanait.
Ils sont épopée des champs, des braves au sommet,
Grignotant l'azur, faisant la nuit embaumée.
Il colore les souples hasards clairsemés,
Ils finissent en ouragans hallucinés.
Spontané, à chaque bêtise il renaît,
Errant d'éclat, de fleur de rien qu'il a aimée.
La vermine mugit
Sous l’apparat rangé, la vermine. Ces gens
Gras lustrent les égouts, la bassesse mugit.
C'est bêtise fougueuse d'un rat émergeant
Des tunnels tordus, le petit enfer rugit.
Des barbelés rongent leur tête préjugeant
Pourris. Le cœur doute, pauvre intelligent
Exsangue du vice. Sa peine de chair gît.
La vermine vole la larme qui surgit.
Le labyrinthe d'antan
Le labyrinthe d’antan aux mille côtés,
Aux ombres perdues sans tombeau s'écartelait
Entre le passé, debout, bavard, rappelé,
La vie, reflet déformé au pied qui boitait.
L'enfant dans un recoin sauve, naïveté
De l'âme courant insolente vers l'allée
Fleurie. Ce penseur sans mémoire bousculait
Libéré, il croquait son bout d'éternité.
Le collier de mes illusions
J'ai fait le collier de mes illusions,
Puis je l'ai laissé filer, ça crissait
D'instants jeunes, perles pleines cassées
Sur le sol de pépites à profusion.
Leur éclat dense m'a touchée, blessée.
Le temps contenu trop franc avançait
Vers mon cœur, demeurante intrusion.
De la vie, j'ai pleuré l'érosion.
L'aube des innocents
Sur les rayons, le poète éblouissait
Les chemins d'abandon. Le soleil devançant
L'ombre possède le sens. Il est seul passant
Dérangeant la vie, elle a tant à confesser.
Le désir est devant lui, son éclat pressé.
Il a l'élan, retombe d'émoi empressé
Pour l'instant mangé, déjà hier, évanescent.
Il se souvient, l'offre à l'aube des innocents.
L'épave vivante
La vague pleine a presque tout refoulé,
Les peines s'endorment profondément cachées.
Elle a laissé l'amnésie, puis s'en est allée,
Pour seule mémoire le sang sur le rocher.
La mer couve les secrets troubles avalés.
L'épave vivante continue de couler,
Les ossements tanguent, maudits, encore accrochés.
La vérité se saigne, se paie entachée.
Là-bas, le sable durcit
Cet arbre vit sur les ruines grattées, fêlées,
La mémoire gît rampante enracinée.
Les fidèles chauves-souris viennent tourner
A la même heure usée, ensorcelées.
L'arbre peine. Les dures ruines décharnées
Capturent les grains en liberté malmenés,
Lourd destin, trop légers hasards morts empalés.
Là-bas, le sable durcit, les pas finis, scellés.
Mon tendre soldat
Mon tendre soldat sur la prairie s'est couché.
Au-dessus des batailles, monte le silence
Qui pleure. Regarde, l'univers s'est penché,
Il honore les surdoués, leur excellence.
Ta tombe est dans mon âme, trouée par la lance
De peine où survit le noble chant, touchée
Par le fort bruissement de l'ange. Il élance
Ses ailes fraternelles. J'y suis accrochée.
Le pardon au fond de l'univers
Il cherche le pardon au fond de l'univers,
Le ciel en sueur, sa colère délavée,
Le nœud difficile de l'âme est ouvert,
Le soir en transe, la lune à son chevet.
L'Ego noir se meurt, l'humain brille au travers,
La nuit expie les fantômes juges, sévères.
Ses pas revenus la traîne d'or ont sauvé
La paix haut portée de celui qui a trouvé.